Universels, intemporels, vernaculaires : les communs fonciers enfin accueillis par la puissance publique ?
Palais du Luxembourg – 17 octobre 2025
Co-parrainé par Pierre Ouzoulias, Sénateur des Hauts de Seine, Loïc Hervé, Sénateur de Haute Savoie, Guillaume Gontard, Sénateur de l’Isère, Frédérique Espagnac, Sénatrice des Pyrénées-Atlantiques, Bernard Delcros, Sénateur du Cantal
Quelles que soient leurs formes et états de forme, variables selon les régions, les communs fonciers, notamment connus en milieu rural sous les termes de communaux ou sectionaux, remplissent des fonctions d’intérêt collectif. Dès lors, ils présentent un grand intérêt pour relever, aux côtés de la puissance publique, divers défis territoriaux : climatiques, alimentaires, énergétiques, écologiques, sociaux, etc. Toutefois, paradoxalement, en pratique comme en droit, bien peu de considération leur est portée – des propositions de lois proposent même de les supprimer – privant la République d’atouts sociaux et environnementaux. Cet héritage n’est pas toujours pris au sérieux, à rebours des discours officiels vantant la participation citoyenne, l’importance de la ruralité ou encore le développement local. La journée du 17 octobre 2025 a abordé les difficultés et freins à la revivification des communs fonciers dans une visée réformatrice afin de réfléchir aux nouveaux contours d’un État apte à promouvoir une société plus collaborative et moins centralisée. La journée a mis l’accent sur le pouvoir transformant des communs fonciers quant à nos modes d’habiter et à nos pratiques démocratiques d’implication territoriale.
VERBATIM
« Les communs fonciers ne sont pas juste des objets, ils vivent au rythme humain. A des moments ils peuvent être délaissés mais ils ne sont pas en train de mourir. Ils sont simplement en train d’attendre la génération suivante. Chez nous des jeunes s’installent et découvrent qu’on peut leur mettre des terres à dispositions des terres. Celles-ci n’étaient bloquées par personnes, elles ne faisaient que les attendre ». Alain Degorce, Membre d’une section de commune, Haute-Loire
« La section de commune est un organisme vivant du fait qu’il y des ayants droit, des hommes, des femmes, qui vivent sur un territoire constitué de forêts, de marais, de rivières, etc. Organisme vivant dans la mesure où ces gens échangent entre eux, il y a une organisation pour faire travailler ce bien de section et pour échanger avec la puissance publique ». Cet organisme vivant à des repères pour fonctionner, non d’immédiateté, mais un repère méconnu. Il travaille dans l’avenir et pour un temps indéfini ». Marc Debray, Membre d’une section de commune, Haute-Loire
« Notre volonté à nous n’est pas de dire que nous ne voulons plus d’Etat ou plus de commune. Nous souhaitons accueillir dans notre propriété collective – j’en fait simplement partie et ce n’est pas la mienne – mais on souhaite aussi protéger la nature. Or la réponse de l’Etat et des représentants d’organismes de protection de la nature a été de nous exclure de la gestion de notre territoire ». Guillaume Ravanel, Président d’une société de consorts – Chamonix
« Un vrai travail d’information et de communication doit être mené pour montrer ce que les communs fonciers peuvent apporter. C’est à la fois du patrimoine mais aussi un moyen de projection dans l’avenir particulièrement intéressant ». Guillaume Gontard, Sénateur de l’Isère
« Je suis un ayant droit des sectionaux et dans ma famille en Corrèze on se chauffe encore avec l’affouage. Les sectionaux nous parlent au quotidien. La façon dont les gens entretiennent par exemple la forêt sectionale, c’est une façon de gérer qui s’inscrit dans la durée, ce qui n’est pas toujours le cas de la sylviculture privée ». Pierre Ouzoulias, Sénateur des Hauts-de-Seine
Un partenariat CHAIRE VALCOM et AMRF (ASSOCIATION DES MAIRES RURAUX DE FRANCE)
Palais du Luxembourg – 17 octobre 2025 – 15 rue de Vaugirard, 75006 Paris – Salle Médicis – 9h à 17h30
Programme prévisionnel
9h – Accueil
9h10 – Ouverture – Pierre Ouzoulias, Sénateur des Hauts-de-Seine, Vice-Président du Sénat, Loïc Hervé, Sénateur de la Haute-Savoie, Vice-Président du Sénat et Cédric Szabo, Directeur de l’Association des maires ruraux de France (AMRF)
9h15 – Introduction. L’enjeu d’émancipation des communaux et des communautés foncières : l’espace des points de vue, par O. Chavanon, Maître de conférences en sociologie, J.-F. Joye, Professeur de droit public, Université Savoie Mont Blanc et A. Meuris, Paysagiste Conseil et Ingénieure agronome, Chaire VALCOM
9h30-10h45 – Temps n° 1 – Les sections de commune, entre discrédit et résurgence émancipatrice
Les sections de commune sont encore très nombreuses dans la ruralité française. Elles représentent un cas emblématique de la situation inconfortable que vivent certaines propriétés collectives : si elles bénéficient souvent de l’attachement des populations et présentent un formidable potentiel pour gérer prudemment les ressources et créer du lien social, elles sont aussi corsetées par un droit administratif qui conduit leurs membres à ne plus disposer du pouvoir d’agir et les exposent à des procédures de suppression souvent expéditives. Comment se manifestent les entraves à la vie des sections ? Que produit localement leur suppression ? Comment améliorer la loi pour que les sections puissent de nouveau jouer un rôle territorial majeur aux plans écologique, économique ou démocratique ?
Animation par Bruno Berthier – Historien du droit, Chaire Valcom, avec :
- Maître Alexandre Riquier – Avocat, Publica Avocats, Paris
- Marc Debray – Membre d’une section de commune, Association culturelle des villages de Retournac, Haute-Loire
- Rachel Bournier – Maire de Sauviat, vice-présidente déléguée à la transition écologique et au développement durable, de la communauté de commune Thiers Dore et Montagne, Puy-de-Dôme
- Gaspard Koenig – Philosophe et romancier
- Pierre Ouzoulias, Sénateur des Hauts-de-Seine
Echanges avec la salle
10h55-12h10 – Temps n° 2 – Communaux, communes rurales : mieux assembler des maillons sous-estimés de la République
En de nombreux territoires ruraux, la coopération « intra » communale redevient une préoccupation des élus afin d’offrir des services aux populations et améliorer la cohésion sociale. Comment resserrer les liens entre les propriétés collectives et les conseils municipaux afin de s’épauler dans la gestion du territoire dans l’intérêt collectif ? Comment articuler les actions d’entités aux logiques de fonctionnement différentes ?
Animation par Cédric Szabo, Directeur de l’AMRF avec :
- Marie-Laure Mugnier – Maire de Saint Paul de Tartas et conseillère départementale, canton du Velay Volcanique, Haute-Loire
- Didier Ranc – Secrétaire de l’Union des Prud’homies de pêche
- Alain Chateauneuf – Maire de Chanaleilles, Haute-Loire
- Alain Degorce – Membre d’une section de commune, Association culturelle des villages de Retournac, Haute-Loire
Echanges avec la salle
12h10 – Fin de la matinée
Pause déjeuner (libre)
14h-15h15 – Temps n° 3 – Communautés villageoises et droits culturels dans la République : du tabou à la reconnaissance
Au sein de la République française de nombreuses communautés villageoises animent la ruralité et prennent soin du territoire. Toutefois leur rôle et celui de leurs propres instances de gouvernance ainsi que les droits d’usage collectifs dont elles jouissent au sein des communs fonciers sont parfois niés. Dans le cas de sections de commune, la loi française leur impose même des modes de fonctionnement exogènes et une personnalité juridique donnée. Comment intégrer, sans crisper, la notion dans les réflexions sur les manières de prendre soin de l’environnement, d’aménager le territoire ou d’appréhender la réalité du phénomène autochtone en métropole française ? Comment l’assumer politiquement et juridiquement ? Tandis que l’État français n’a pas signé la convention de Faro sur la valeur du patrimoine culturel pour la société, comment mieux reconnaitre les identités et droits culturels afin de conforter et non pas diviser la République ?
Animation par Gaële Gidrol-Mistral – Professeuse de droit privé à l’Université du Québec à Montréal, UQAM, GRDP, et Mélanie Clément-Fontaine, Professeure de droit privé, Université Paris Saclay, DANTE, SAFIR, avec :
- Philippe Descola – Anthropologue, Professeur émérite du Collège de France, Chaire d’Anthropologie de la nature, Laboratoire d’Anthropologie Sociale (ENS/EHESS)
- Gérald Andrieu – Journaliste et essayiste
- Guillaume Ravanel – Co-gérant de la société des consorts des Chéserys, Chamonix
- Vincent Veschambre, HDR en géographie, directeur du Rize, Centre mémoires, cultures, échanges de la Ville de Villeurbanne
Échanges avec la salle
15h30-16h45 – Temps n° 4 – Ingénierie territoriale environnementale : le service public renforcé par l’action des communs fonciers
La logique collaborative des communs se heurte souvent en pratique à la logique descendante du fonctionnement du service public. Comment mieux accueillir l’envie de s’impliquer des populations en faveur de la protection de leur environnement ? Comment reconnaitre l’utilité de l’expérience voire de l’expertise des populations et créer un climat de confiance ? Comment mobiliser le principe de subsidiarité horizontale ? Quelles nouvelles formes d’ingénierie territoriale sont possibles avec ou en dehors du service public par l’apport des communs fonciers ?
Animation par Florence Lerique, Professeure de droit public à l’Université Bordeaux Montaigne, avec :
- Jean Karinthi – Président de la foncière coopérative de L’Hermitage, tiers lieu d’innovation rurale et citoyenne (Oise)
- Thomas Perroud – Professeur de droit public à l’Université Panthéon-Assas
- Thibaut Guigue – Président de Métropole Savoie (syndicat mixte de gestion du SCOT)
- Guillaume Gontard, Sénateur de l’Isère
Echanges avec la salle
17h – Conclusion – perspectives (G. Gontard, Sénateur, Chaire Valcom, AMRF)
Avec le soutien de la Fondation de France, de la Coop des Communs, de la Fondation USMB, de l’ANR (appel à projet ExcellenceS, Université Savoie Mont Blanc/USMB, projet SHINE) et du Centre de recherche en droit Antoine Favre (USMB).
